Une nouvelle nuit interrompue. Nora n'avait même pas voulu prendre la peine de regarder l'heure. Il faisait encore nuit, c'est tout ce qu'elle devait savoir. Ce n'était pas comme si c'était la première fois qu'elle se réveillait en sursaut, avec cette horrible impression d'étouffer. Crise de panique, avait-on dit les premières fois, alors qu'elle ne devait pas avoir plus de 10 ans. Ses parents ont bien essayé de faire disparaitre le problèmes à coups de potions plus infectes les une que les autres, de cris, de "traitements chocs". Les crises ne l'ont jamais quittés, mais au moins elle avait appris à s'en occuper elle-même. C'était devenu une habitude pour elle, avec les années. D'un main encore un peu tremblante, la sorcière attrapa le verre d'eau posé sur sa petite table de chevet et le cala à grande gorgée. Puis, elle glissa gracieusement une jambe puis l'autre hors du lit, tirant ses draps sur ses épaules à sa suite et s'y entortillant comme dans une toge. Pour quelqu'un qui avait vécu près de 25 ans dans le luxe le plus complet, le petit appartement manquait de confort. Avec sa frêle figure, Nora supportait bien mal le manque de chaleur. Qu'est-ce qu'elle aurait donné pour un grand foyer devant lequel s'installer, se bercer avec un bon livre au son du crépitement des flammes qui lèchent les bûches. Elle traina sa cape improvisée jusque dans la salle de bain. Le jet l'eau était chaud, mais pas assez pour la calmer complètement. Il fallait s'y faire. À chaque matin, elle entrait dans la petite cabine et espérait que le résultat changerais, que pendant la nuit un miracle ait changé le conduit d'eau, mais elle savait bien que des miracles, ça n'existait pas. Combien de temps resta-t-elle sous le jet, elle l'ignorait, mais quand elle en sorti, une grande serviette bien moelleuse enserrée autour d'elle, Nora percevait les premiers rayons du soleil à travers la petite fenêtre embuée de la pièce.
Fidèle è ses vieilles habitudes, la sorcière s'installa devant son miroir et commença à se farder. Ses traits étaient naturellement fins et beau, elle n'aurait pas eut besoin de tout ce travail, mais c'était une des rares choses dont elle était fière. Non seulement est ce que Nora était une femme magnifique, mais elle savait comment l'accentuer, comment se perfectionner. Elle ne savait pas faire beaucoup, elle n'avait jamais eut droit d'étudier la magie à l'école, elle ne savait que ce qu'on avait voulu lui enseigner, mais au moins, elle pouvait toujours s'assurer d'être parfaite. Un fois seulement est-ce qu'elle fut satisfaite du reflet qui la regardait de l'autre côté du miroir, se décida-t-elle a regarder l'heure. Il lui restait encore quelques heures avant de devoir retourner derrière son bureau, mais Nora n'avait aucune envie de rester enfermée dans les murs de l'appartement. Qu'y ferrait-elle autre que de s'apitoyer sur son sort? Pour ajouter à ça, elle trouva son garde-manger vide. C'était l'excuse qu'elle avait besoin.
Le soleil l'aveugla le moment où elle mit un pied à l'extérieur, mais Nora continuait à avancer. Elle connaissait déjà par coeur le chemin jusqu'au petit café où elle passait une majorité de ses matins. Il était juste assez près de chez elle pour qu'elle s'y rende à pied, mais assez loin de toute grande artère sorcière pour qu'en deux ans, elle n'y ait jamais croisé personne qu'elle reconnaissait ou qui la reconnaisse. Et puis leur café était le seul qui la tenait éveillée même après ses nuits incomplètes. Tête basse -une posture quelle avait adoptée pour éviter de rencontres inopportune sur la route- elle avançait dans les rues encore désertes. Un question s'imposa alors à l'esprit de la sorcière: est-ce qu'elle le croiserait encore ce matin? Jamais est-ce que Nora n'avait cru au coïncidences, on ne l'avait pas élevée pour, mais même elle devait admettre qu'il y avait quelque chose d'anormal dans le fait de croiser presque à chaque jour la même personne. Elle avait failli ne plus jamais revenir la troisième fois qu'elle l'y avait croisé, elle avait trop peur que ce soit un espion ou quelqu'un qui croyait l'avoir reconnue, mais elle avait détecté quelque chose de familier en lui: il pensait probablement la même chose. Elle avait donc décidé qu'il était inoffensif. Oh, ils ne se parlaient jamais. Probablement qu'ils ne le ferraient jamais non plus. C'était peut-être mieux ainsi.
Une petite file avait commencé à se former quand Nora atteignit enfin le petit café et ce fut presque suffisant pour la faire partir. Les années l'avait rendue plus impatiente, et elle commençait à douter de sa décision de venir en premier lieu, mais elle se retrouva tout de même à l'arrière de la file. Plus rapidement qu'elle ne l'espérait, elle se retrouva au comptoir et n'eut même pas besoin de placer sa commande, on la connaissait déjà. La chaleur de la petite tasse entre sa main gauche était réconfortante et une seule gorgée suffit à lui redonner l'énergie que son réveil abrupte lui avait enlevé. Papiers de travail dans une main, tasse dans l'autre, elle commença à se frayer une chemin parmi la foule de plus en plus grande pour un si petit espace. À maintes reprises, elle évita la catastrophe, se contorsionnant pour éviter un coup de coude ou une éclaboussure. Elle se croyait sauve en arrivant à une table mais au moment où elle allait pour poser ses choses, on sa renversa, envoyant valser ses papiers et son café aux pieds de son voisin de tables. Nora était trop polie pour laisser sortir la filée de grossièreté qui lui passèrent par la tête quand elle se pencha pour ramasser le dégât qu'elle avait fait. «Pardonnez-moi. Je ne sais pas ce qui est arrivé. Je suis vraiment désolée.» se confondit-elle en excuse alors qu'elle tentait de sauver ses papiers qui commençaient à s'imbiber de café. Elle finit par se relever et se retrouva bouche-bée. Il fallait bien qu'elle commence à croire aux coïncidences parce que la victime de sa maladresse n'était autre que le mystérieux étranger.
Autant est-ce que Nora aimait sa routine matinale, elle redoutait toujours un peu d'aller au petit café. Naviguer entre tous ces moldus n'était pas chose aisée pour quelqu'un qui avait passé une vie entière à se faire dire qu'ils étaient contagieux et que si elle ne faisait qu'en toucher un elle perdrait tous ses pouvoirs. Consciemment, la jeune femme savait bien que ce n'était qu'un panier de salades qu'on avait utilisé pour lui laver le cerveau, elle n'était pas idiote, mais il est difficile de se séparer de ses habitudes. S'adapter à cette nouvelle vie s'avérait plus difficile qu'elle ne l'avait crut. Le seul moyen que Nora avait de s'habituer était de retomber dans des routines claires et précises. C'est tout ce qu'elle avait connu et c'est tout ce qu'elle acceptait. Le moindre changement dans la balance de sa journée la désemparais complètement. Quand elle réalisa finalement à qui elle venait d'accorder la parole, elle dû se retenir pour ne pas prendre ses jambes à son cou. La sorcière s'était habitués à sa présence. Elle le voyait régulièrement, parfois ils se souriaient mais c'était tout. C'était sa routine, son habitude, et elle était confortable avec ça. Elle mentirait en disant qu'elle n'avait jamais été curieuse de savoir qui il était, mais elle préférait garder ses distance, parce que c'était ce à quoi elle avait été habituée. Maintenant, c'était terminé. Bien malgré elle, Nora avait fait les premiers pas, mais maintenant qu'il était trop tard, elle ne comptait plus reculer. Elle offrit un petit sourire à l'homme qui l'aida à ramasser les dégâts. Pendant un moment, elle s'était presque attendue à ce qu'on la traite d'empotée, l'aide de l'inconnu la surpris un peu. «Outre mon orgueil qui en a prit un coup, je vais bien, merci. Vous êtes trop aimable. J'espère que je n'ai pas ruiné vos pantalons.»
Après plusieurs essais vains, Nora dut se rendre à l'évidence: à moins d'utiliser de la magie, elle n'arriverait pas à sauver la moitié de ses documents. Avec un soupir de résignation, elle se redressa. Il faudrait qu'elle demande de l'aide à quelqu'un au ministère avant que son patron ne revienne parce que sinon, elle était bonne pour une semaine de commentaires désobligeants. Elle remercia encore une fois l'homme de son aide, le gratifiant d'un nouveau petit sourire. «Pourquoi pas? C'est très gentil.» répondit-elle en baissant un peu la tête, modestement, trahissant son éducation plus que classique. Refuser l'offre de l'homme ne lui avait même pas traversé l'esprit. Rendue à ce point, elle n'avait rien de mieux à faire, vraiment. Maintenant qu'elle n'était plus accroupie par terre, elle pouvait mieux l'observer. Elle ne se cachait même pas. Elle le détaillait de ses yeux azurs. Il y avait quelque chose de vaguement familier dans son visage, des traits qu'elle avait déjà vus peints sur d'autre visages, mais celui de l'homme était nouveau. «Oh, quel manque de politesse. Je suis désolée. Je suis Nora. Nora Gray.»
Plus Nora observait le jeune homme plus elle réalisait pourquoi elle l'avait remarqué en premier lieu. Un peu comme elle, il ne cadrait pas entièrement dans le décor. Il était habillé comme n'importe quel autre homme assis autours d'eux, mais pourtant il ne semblait pas exactement comme eux. Un peu moins à l'aise peut-être? Non. Elle n'arrivait pas à déterminer quoi, mais il y avait définitivement quelque chose de différent. Pendant une fraction de seconde, l'hypothèse qu'il puisse être un sorcier lui aussi lui effleura l'esprit et la pétrifia. Certes, elle n'était pas un visage connu dans le monde sorcier, seulement dans quelques cercles assez fermés... mais on ne pouvait jamais vraiment savoir. Le sourire qu'il lui fit, toutefois, semblait sincère, et Nora avait connus assez de mangemorts pour savoir qu'ils ne pouvaient pas être d'aussi bons acteurs, ce qui la rassura. Et puis quelle était la probabilité qu'elle croise un autre sorcier dans ce petit café? Presque nulle. Derrière ses grands cils, Nora ne pouvait s'empêcher de jeter des petits regards à l'homme, tentant de le détailler un peu plus. Clairement, il était plus attirant que l'ancien mari de la sorcière l'avait été... et ses yeux lui rappelaient ceux de Stuart. Était-ce pour ça qu'elle se sentait interpellée par cet homme? Parce qu'il lui rappelait le prisonnier qui lui avait volé son coeur? Une légère coloration monta aux joues de la jeune femme, bien malgré elle. Il fallait qu'elle pense à autre choses. Par chance, l'homme trouva, probablement malgré lui, un moyen d'interrompre la discussion intérieur de Nora avait. D'un coup sec, Nora releva la tête pour le regarder, les yeux grands ouverts, surprise. Black. Il aurait été difficile, voir impossible, qu'elle ne connaisse pas ce nom. Celui de Regulus ne lui était pas étranger non plus, mais elle ne pouvait pas se souvenir exactement de tout ce qu'elle savait sur lui. D'aussi loin qu'elle puisse se souvenir, elle ne croyait pas avoir un jour rencontré aucun des frères Black, il n'y aurait aucune raison qu'il ne la reconnaisse... mais qui sait? Malgré le tourbillon sous son crâne, Nora ne put s'empêcher de sourire quand il attrapa sa main pour la baiser comme il le fallait, comme on l'apprenait dans des familles comme les leurs. Il y avait tellement longtemps que la jeune femme n'avait pas vu tant de galanterie qu'elle ne pouvait s'empêcher de se laisser faire. C'était un terrain qu'elle connaissait. Il tira sa chaise aussi et, par réflexe, elle le remercia qu'un petit inclination de sa tête. Aux yeux des autres clients autour, ils devaient avoir l'air complètement ridicule. S'il y avait bien une chose que Nora avait appris, c'était que chez les moldus, les bonnes manières se faisaient rares. Alors de voir deux personnes aussi maniérées qu'eux devait être presque effrayant pour eux. «Merci, mais ce n'est pas moi qu'il faut complimenter pour le choix, mais mes parents.» répondit-elle, plus que courtoise. Elle ne mentait pas complètement, non plus. Ses parents ne l'avaient peut-être pas prénommée de la sorte au départ, mais ce nouveau nom n'était qu'un dérivé de son ancien patronyme. «Regulus... ce n'est pas un prénom très commun, je dois l'avouer. C'est le genre de prénom qu'on retient toute une vie quand on le croise, non?»